crédit photo : Zach Balbino
L’impression 3D a révolutionné bon nombre de secteurs tels que l’industrie, le bâtiment ou la santé. Parfois, elle apparaît aussi dans des domaines plus surprenants comme le textile et l’habillement ! Qu’il s’agisse de stylistes indépendants ou de grandes maisons, la mode s’intéresse de plus en plus à cette nouvelle manière de confectionner des vêtements par impression.
Voilà quelques années déjà que les technologies 3D ont pénétré dans la mode et plus particulièrement au sein de la haute-couture. Un intérêt suscité par la grande liberté qu’elle confère aux créateurs. Avides d’innovation, ces derniers cherchent à élaborer de nouveaux design à travers des formes complexes et des textures variées.
Aussi appelée fabrication additive, l’impression 3D offre la possibilité de créer des objets en trois dimensions à partir d’un fichier numérique. Il suffit alors de modéliser son patron sur un logiciel puis de lancer l’impression.
Des vêtements aux chaussures en passant par les accessoires, cette technologie permet d’aborder la mode sous un nouvel angle. Par ailleurs, l’impression 3D pourrait aussi répondre à certains enjeux comme la personnalisation, le confort ou l’éco-responsabilité.
Au-delà du prêt-à-porter conventionnel, la haute-couture laisse souvent place à de nouvelles formes d’expression. La créatrice Iris Van Herpen adopte totalement cette approche, en se distinguant par des collections organiques et sculpturales. Avec son esthétique empruntée à la science-fiction, cette néerlandaise de 37 ans séduit par ses robes biomorphiques, ses exosquelettes et autres excroissances.
Mélange d’artisanat et de technologie numérique, elle a recours à l’impression 3D et à la découpe laser pour façonner ses costumes aussi poétiques qu’étranges. C’est en 2008 que lui vient cette idée, lorsqu’elle doit imaginer pour deux architectes, une robe inspirée d’un musée qu’ils venaient de construire. Iris Van Herpen décide alors de créer une forme complexe grâce à l’impression 3D, aussi utilisée en architecture. « J’ai compris le potentiel de cette technique et l’ai progressivement intégrée à mon travail. Lors de mon premier défilé haute couture à Paris, en 2011, la moitié de la collection était imprimée en 3D. » confie-t-elle au magazine Le Temps.
Depuis, l’impression 3D fait partie intégrante des défilés de la modéliste. Pour sa collection Printemps-Été 2019, les tenues ont été réalisées à travers la technologie Polyjet, afin de créer des fines lamelles qui seront plus tard ajoutées au tissu. Après avoir été modélisée sur ordinateurs, la maquette est réalisée par impressions sur des machines alimentée par Très Haut Débit. En effet, pour un résultat parfait, les imprimantes ne doivent subir aucun bug ou latence. Ainsi, la fibre se présente comme la solution la plus adaptée pour suivre la fabrication additive.
Régulièrement, Iris Van Herpen réalise des œuvres collaboratives avec des ingénieurs ou grandes écoles, afin de bénéficier de leur expertise technologique. Elle a, par exemple, créé des parures avec l’Université de Technologie de Delft (Pays-Bas). Adaptés en fonction de la morphologie de chaque mannequin, ces masques ont nécessité un scan facial avant l’impression en trois dimensions.
La créatrice a aussi travaillé avec Kim Keever un ancien ingénieur de la NASA reconverti dans l’art pour sa tenue Cosmica. L’impression 3D est ainsi devenue une passerelle entre imaginaire et conception. Bien que ces créations ne soient pas destinées à être portées quotidiennement, les vêtements imprimés pourraient bel et bien trouver leur place dans notre dressing.
Loin de la fast fashion et de son aspect consumériste, la fabrication additive pourrait bel et bien concevoir les vêtements de demain. Avec la démocratisation des outils numériques, cette technologie est devenue très accessible pour les professionnels. Le déploiement de la fibre optique a, lui aussi, grandement facilité les usages et l’évolution de l’impression 3D. Aujourd’hui, il est possible de créer des objets personnalisés, dans une multitude de matériaux. Ces spécificités répondent parfaitement aux demandes du secteur de l’habillement : éco-conception, matière responsable, recyclage, petites séries, sur-mesure…
La demande de personnalisation, par exemple dans la mode, est de plus en plus importante. En plus de l’esthétique, les consommateurs souhaitent des vêtements confortables, agréables à porter. Mais pas toujours facile de trouver chaussure à son pied, surtout lorsque la plupart des grandes marques ne s’adaptent pas à toutes les morphologies.
Cette problématique, Ganit Goldstein souhaite y remédier grâce aux nouvelles technologies. À l’aide d’un scan corporel, la styliste conçoit des vêtements ajustés aux courbes de chacun. À l’instar de nombreux créateurs, elle utilise également les machines PolyJet qui permettent d’imprimer des éléments directement sur le textile.
© Ganit Goldstein
En France, la startup Endeer a lancé SHAPE, un soutien-gorge à armatures imprimées en 3D. Ainsi, chaque femme a la possibilité de faire fabriquer un sous-vêtement parfaitement adapté à sa morphologie. Une problématique que rencontrent beaucoup de femmes, dont certaines souffrant de malformation.
© Endeer
Deuxième industrie la plus polluante au monde, la mode fait de l’environnement l’un de ses principaux enjeux. En produisant des vêtements de qualité, confortables et en plus petite série, l’impression 3D pourrait bien figurer parmi les méthodes de fabrication du futur.
Mais la technologie de l’impression 3D ne s’arrête pas là ! Grâce à une perpétuelle innovation, les ingénieurs ont réussi à créer des machines utilisant des fibres recyclées. C’est notamment à base de cette matière première que Julia Davivy conçoit ses vêtements par fabrication additive. Par ailleurs, l’impression n’utilise que la matière dont elle a besoin pour créer le vêtement : il n’y a donc aucune chute ou gâchis. La créatrice émet le souhait de rendre la mode plus responsable et d’éloigner le secteur des procédés industriels et polluants. « Notre objectif n’a jamais été de démontrer la viabilité des vêtements imprimés en 3D et d’en rester là. Nous aurons atteint notre objectif lorsque ces vêtements magnifiques, confortables, fabriqués de manière éthique et respectueuse de l’environnement seront la norme ».
© Julia Davivy
Au service de la mode, l’impression 3D est un merveilleux outil permettant de libérer l’imagination des créateurs. Grâce à des technologies numériques multi-matériaux, couleurs ou à impression directe sur textiles, des stylistes tels qu’Iris Van Herpen donnent forme à des silhouettes exubérantes, avant-gardistes et poétiques.
Plus qu’un instrument d’expression artistique, les imprimantes 3D pourraient bien répondre aux problématiques actuelles auxquelles fait face l’industrie textiles : le confort et l’environnement. Complétés par un scan corporel, les ateliers sont en mesure de confectionner des vêtements sur-mesure, adaptés à chaque morphologie. D’autre part, la fabrication additive permet de choisir les matériaux avec lesquels les créateurs souhaitent travailler : des matériaux responsables ou recyclés, où aucune ressource n’est perdue.
Si pour le moment l’impression 3D reste assez rare et onéreuse, elle continue de gagner les professionnels du textile et de l’habillement. Avec la démocratisation de la fibre optique, la fabrication additive est de plus en plus accessible et répandue dans de multiples secteurs d’activités. De fil en aiguille, cette technologie pourrait bien devenir l’un des procédés de fabrication de demain !
Charlotte B.